Trois mois. Avant. Les « grandes » vacances duraient presque trois mois, avant. Est-ce à cause de cette longue trêve ? Pour qu’on n’efface pas de nos mémoires le rythme de l’année scolaire ? Mais cette parenthèse attendue emmenait presque toujours avec elle, soigneusement rangé entre les draps de bains, les maillots et la crème solaire, un compagnon dont nous espérions, chaque fois, qu’il aurait été oublié à la maison.
Le cahier de devoirs de vacances.
Toujours d’actualité, il n’est pas réservé aux cancres. Non. Même les meilleurs y ont droit. Les premiers pour tenter de combler les lacunes qui ont longtemps été une menace de redoublement. Les autres, pour conserver le niveau d’excellence qui en fait, généralement, les cibles favorites des premiers.
Comme si on pouvait tout apprendre ou tout oublier en trois mois.
Parfois les jours de pluie, sinon le matin avant toute autre occupation, on le sait, les devoirs de vacances servent de passe-temps à nos chères têtes blondes.
Trop longs pour certains. Trop courts pour quelques uns (plus rares).
Et après, la délivrance. Les vraies vacances de la journée commencent.
Finalement, c’est comme la sonnerie du début de récré.
Le plaisir la suit. De près.
Au fil des années, les éditeurs s’emploient à les rendre plus attractifs, plus « sympas », plus ludiques. Mais comment réellement s’amuser avec ce qui est une obligation quotidienne tout au long de l’année ? Même avec de la couleur, des exercices en bandes dessinées, un devoir reste un devoir…
Et qui dit devoir, dit droit… Droit à l’information, droit de penser, de dire, de faire ce qui nous chante, droit à la liberté d’expression…
Une liberté d’expression qui a littéralement explosé, depuis le début du millénaire, avec les nouveaux moyens de communication, Internet en tête. Et que j’te maile, et que je te facebooke, et que je te twitte, et que je te blogue à tour de clavier…
Le pire et le meilleur s’y côtoient pour le plus grand plaisir des millions de novo-lecteurs qui ne voudraient surtout être en reste ! Puisqu’on leur donne à lire en quantité illimitée, gratuitement pour la plupart du temps, pourquoi ne pas en profiter ?
Dès le matin, se jeter sur son écran est devenu le geste prioritaire, primordial, indispensable.
Une obligation. Plus. Un devoir.
Qui précède, là aussi, le plaisir.
De savoir, d’être au courant, de connaître, de découvrir.
En sommes-nous seulement conscients, nous, blogueurs(ses) de l’ombre, du clair-obscur ou, plus rarement, de la lumière ?
Avons-nous capté, qu’à chaque touche de clavier stimulée par nos doigts répond, quelque part dans le monde, un regard impatient, intéressé, avide, curieux de notre prose ? Que nous induisons une dépendance, aussi infime soit-elle, avec nos lecteurs…
Dépendance ou inter-dépendance ? Finalement, sans cette attente, formulée ou non, qui nous dit, nous murmure, « encore, encore », aurions-nous l’envie, l’énergie, la motivation de nous y coller tous les jours ? Certains répondront oui, avançant que l’intérêt de ce dont ils traitent est largement suffisant à entretenir leur flamme d’écrivains génération 2.0… Mais derrière ces remparts d’une rationalité bien rassurante, le temps de l’éphémère n’est jamais bien loin…
Quelques secondes. Aujourd’hui. Quelques secondes suffisent.
Pour savoir si on a « rencontré son public ».
Établi le lien, créé le contact, installé l’addiction.
Quand je vois, depuis quelques semaines, certains blogs arborer un message du type « en vacances pendant 3 semaines, à très bientôt », j’en suis un peu interloqué…
Que va faire le lecteur (la lectrice, sorry, « la parité » !) privé brutalement de son texte journalier, de sa bonne tranche de blog dégusté avec le café du matin ?
Plus de twitt twitt twitt pour ouvrir les yeux se sachant destinataire d’un scoop unique !!!
Aujourd’hui, ce rituel est souvent le point de départ de notre, votre, leur quotidien, comme les devoirs de vacances rythmaient autrefois le démarrage de notre (votre, leur) journée de vacances.
Soumettre nos lecteurs à l’abstinence, c’est le risque, pour chaque blogueur(se) de se voir, avant même le retour de vacances, abandonné sur le bord de l’autoroute (de la communication) tel un animal familier remplacé par un autre…
N’oublions pas qu’aujourd’hui, les moyens dont chacun dispose lui permettent d’être connecté en permanence, sur la plage, à l’apéro, dans les calanques ou sur un bateau !!!
Et que « faute de geek on peut très bien accepter de manger des merdes » (dicton de l’été)…
La capacité d’écrire est un plaisir. Plus. Écrire est un pouvoir.
Être lu, plaire, se sentir attendu, désiré, c’est comme être sur le toit du monde… ou de l’abri de jardin du monde, soyons modeste…
Soyons reconnaissants de l’intérêt que nous portent nos lecteurs.
Et, malgré nos vacances, assumons ce peu de pouvoir que nous donne notre petit talent.
Continuons nos devoirs.
Pour leur plaisir.
C’est notre devoir.
Car, ainsi que le disait l’oncle d’un super héros (ce sont les vacances pour moi aussi, un peu, hein ?!) :
« De grands pouvoirs donnent de grandes responsabilités »…
Léo Myself
P.S : Comme ce sont les vacances -on l’aura compris, je crois- c’est la saison des jeux : qui peut me dire de quel super héros s’agit-il ?